Cass. soc.1er juin 2016, n°14-21.143

Une société de prestation de services aux pharmacies d’officine, établie à la Seyne-sur-Mer, avait cédé à une autre société une branche d’activité portant sur la gestion de tiers payant de cinq pharmacies faisant partie de sa clientèle. Une des salariées se trouvait ainsi transférée, en application de l’article L.1224-1 du code du travail, à la société cessionnaire, sans modification de son contrat de travail, si ce n’est le lieu de travail désormais basé à Lyon.

La salariée avait refusé cette modification de son contrat de travail et avait été licenciée, non pas pour motif économique mais pour motif personnel, du fait de son refus de changement de ses conditions de travail. La salariée a contesté son licenciement en faisant valoir notamment que lorsque l’application de l’article L.1224-1 du Code du travail entraîne une modification du contrat de travail autre que le changement d’employeur, le salarié est en droit de s’y opposer selon une jurisprudence constante et que ce refus ne peut constituer un motif de rupture du contrat de travail.

La Cour de cassation ne suit pas l’argumentation de la salariée : «Mais attendu que, lorsque l’application de l’article L. 1224-1 du code du travail entraîne une modification du contrat de travail autre que le changement d’employeur, le salarié est en droit de s’y opposer ; qu’il appartient alors au cessionnaire, s’il n’est pas en mesure de maintenir les conditions antérieures, soit de formuler de nouvelles propositions, soit de tirer les conséquences de ce refus en engageant une procédure de licenciement ; que la cour d’appel qui a constaté que le transfert partiel à la société TPA sise à Lyon de l’entité économique à laquelle était rattachée la salariée avait entraîné par lui-même une modification de son contrat de travail, en a exactement déduit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n’est pas fondé ».

En validant le licenciement ainsi prononcé, la Cour de cassation permet au cessionnaire de licencier un salarié automatiquement « repris » par l’application de l’article L.1224-1 du Code du travail du fait de son refus de la modification de son contrat de travail.

Cette solution nouvelle est dérogatoire du « droit commun », puisque la jurisprudence considérait jusqu’alors qu’un employeur ne pouvait valablement licencier un salarié du fait de son refus de la modification de son contrat de travail (Cass. soc. 7-7-1998 n° 96-40.256).

La Cour de cassation permet ainsi au cessionnaire placé dans cette situation d’avoir à prononcer un licenciement pour motif économique, ne reposant pas sur la personne du salarié, qui a toutes les chances d’être dénué de cause réelle et sérieuse. Il s’agit donc d’une avancée significative en faveur des employeurs-cessionnaires confrontés à un refus d’une modification de leur contrat de travail par un salarié « repris » en application de l’article L.1224-1 du Code du travail.

Cet article a été écrit par Delphine Monnier